À tous nos membres,
Au nom du Bureau de direction de l’ACA, j’ai le plaisir de vous communiquer cette première ébauche de la « Déclaration sur le traitement éthique des restes humains ». Ce document a été rédigé par les membres du Bureau de direction et approuvé par cinq personnes provenant des communautés archéologique, autochtone et bioarchéologique. Veuillez envoyer vos commentaires à president@canadianarchaeology.com et/ou nous retrouver à l’Assemblée générale annuelle à Saskatoon, le samedi 4 mai 2024, entre 15h30 et 17h (CST). Vous y aurez l’opportunité de discuter de ce document proposé et de voter.
Dans l’attente de vos commentaires, et vous en remerciant par avance,
Helen Kristmanson
Présidente
Dernière version, du 13 avril 2024
Association canadienne d’archéologie
Déclaration sur le traitement éthique des restes humains
Mai 2024
L’archéologie est l’étude du passé humain ancien et récent au travers de vestiges matériels. La nature de leur travail faisant que les archéologues peuvent découvrir et avoir à étudier des restes humains, l’Association canadienne d’archéologie (ACA) a rédigé cette déclaration en complément de ses Principes de conduite éthique.
Les gens entretiennent une relation unique avec les restes humains. Ceux-ci peuvent avoir une signification personnelle, culturelle, symbolique, spirituelle ou religieuse. Ils peuvent constituer d’importants symboles culturels et politiques d’identité et d’association avec la terre. Ils ont également une valeur patrimoniale, archéologique, scientifique et pédagogique, puisqu’ils procurent d’importantes informations sur les populations d’autrefois.
L’importance des restes humains pour les peuples autochtones du Canada a été affirmée et reconnue par le rapport de 1992 du Groupe de travail sur les musées et les Premiers peuples, Tourner la page. Forger de nouveaux partenariats entre les Musées et les Premières Nations ; par les Appels à l’action de 2015 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada ; par le rapport de 2022 de l’Association des Musées canadiens, Portés à l’action : appliquer la DNUDPA dans les musées canadiens ; et par le rapport de 1996 de la Commission royale sur les peuples autochtones (vol. 3, en anglais) ; ainsi que par diverses politiques et ententes.
Les avis divergent quant aux nombreux aspects du travail avec des restes humains, sur ce qui constitue l’engagement, la consultation ou la collaboration, et sur ce qui constitue les meilleures pratiques. Cette déclaration n’entre pas dans les spécificités de tous les points de vue ; elle établit plutôt des principes généraux.
Depuis sa fondation en 1968, l’ACA s’est consacrée au patrimoine archéologique du Canada. Pour cette raison, les principes exposés dans cette déclaration s’appliquent à tous les aspects du travail archéologique au Canada, y compris ceux impliquant des restes humains. Les travaux concernés par cette déclaration comprennent, sans s’y limiter, les fouilles, la recherche, l’enseignement, la conservation, les expositions, les publications, les restitutions et les ré-inhumations. La déclaration ne s’applique pas aux restes humains faisant l’objet d’une enquête policière ou médico-légale. Bien qu’elle soit conçue pour s’appliquer au Canada, elle peut également servir de guide aux membres de l’ACA travaillant dans d’autres pays. Il est possible d’éviter les maux associés à quelques-unes des anciennes pratiques de l’archéologie en se basant sur ces principes.
Premier principe. Comprendre les lois et politiques applicables et s’y conformer.
Chaque pays possède sa propre législation, qui peut inclure des instruments relatifs au travail avec des restes humains. Au Canada, cette législation est complexe. Un certain nombre de lois et politiques fédérales, provinciales et territoriales encadrent la question des restes humains. En outre, il existe des arrangements formels avec les Peuples autochtones, incluant des traités et des ententes sur l’autonomie gouvernementale. Il peut exister aussi des protocoles d’accords. Ces cadres définissent les exigences et les façons de procéder lorsque l’on découvre—ou que l’on travaille avec—des restes humains, y compris le respect des engagements pris et la consultation. Il est important de mentionner que la législation et la politique canadiennes évoluent en fonction de la jurisprudence et des instruments internationaux, de même que des droits, des lois et des juridictions autochtones. Il se peut que des obligations éthiques transcendent les cadres légaux définissant les normes du travail archéologique avec des restes humains.
Deuxième principe. Rechercher et intégrer les points de vue pertinents.
Il est important de rechercher et d’intégrer les points de vue des parents proches, des descendants en ligne directe, des communautés ou des populations de descendants, des peuples autochtones concernés, des organisations et communautés, des communautés non autochtones concernées, des groupes culturels et religieux affiliés, et d’autres parties prenantes (ci-après les personnes, communautés ou groupes concernés), lorsqu’il s’agit de décider de la nécessité de travailler avec des restes humains et de la façon de le faire. Dans certains cas, cela peut signifier ne pas faire ce travail à moins qu’il ne soit exigé par la loi.
Troisième principe. Rechercher le consentement, s’engager, collaborer et communiquer
Tous les efforts raisonnables doivent être entrepris pour obtenir le consentement préalable libre et informé des personnes, communautés ou groupes concernés avant de travailler avec des restes humains. À chaque étape du travail, il faut raisonnablement s’efforcer de s’engager, collaborer et entretenir la communication avec les personnes, communautés ou groupes concernés.
Quatrième principe. Traiter les restes humains avec respect
Les restes humains méritent toute la dignité et le respect que l’on accorde aux vivants. Ce principe s’applique à tous les restes humains, indépendamment de l’ethnicité, du sexe, de l’âge, de la religion, de la nationalité, du statut socioéconomique, des traditions culturelles, des formes d’inhumation, de l’état des restes humains ou des circonstances de leur acquisition.
Cinquième principe. Suivre les meilleures pratiques et maintenir les standards éthiques les plus élevés
Le travail avec des restes humains devrait être approché sous l’angle des soins éthiques, de la responsabilité et de l’équité, plutôt qu’en s’imaginant avec arrogance qu’on les possède ou qu’on en a l’exclusivité. Tout le travail doit être effectué par des individus possédant les qualifications et la formation appropriées. Les étudiant·e·s doivent être attentivement supervisé·e·s par un personnel expérimenté et convenablement formé. Il faut conserver la transparence quant aux sources de financement et éviter les conflits d’intérêts, les violations de la vie privée, ou de nuire à qui que ce soit au cours du travail et dans toutes les utilisations ou tous les archivages ultérieurs de ces données.
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L’ACA rappelle à ses membres qu’ils et elles doivent se conformer à son Code d’éthique (https://canadianarchaeology.com/caa/fr/about/ethics/principles-ethical-c... ; https://canadianarchaeology.com/caa/fr/about/ethics/la-presentation-des-...), ainsi qu’à toutes les autres politiques et procédures en vigueur pour le traitement des restes humains dans les fouilles, les recherches en laboratoire, l’enseignement, la conservation, les expositions et les publications, même si ils et elles ne s’attendent pas à découvrir de restes humains. Nous invitons également les membres de l’ACA et les organisations affiliées à élaborer leurs propres politiques si cela est jugé approprié. Les principes exposés ci-dessus peuvent servir de cadre à l’élaboration de ces politiques.
Les normes éthiques de la pratique archéologique continueront d’évoluer. Par conséquent, cette déclaration sera revue tous les sept ans au minimum afin de s’assurer qu’elle reflète les évolutions de la loi et des normes. Il est de la responsabilité du Comité d’éthique de l’ACA, du Comité sur les questions autochtones et du Groupe de travail sur les sépultures non marquées de rédiger une déclaration actualisée conformément à la tâche qui leur a été attribuée par le Bureau de direction de l’ACA.
Pour rédiger cette déclaration, l’ACA a adapté le contenu du Statement Concerning the Treatment of Human Remains de la Society for American Archaeology, daté du 14 avril 2021. https://www.saa.org/career-practice/saa-statements-guidelines/statement-details/2021/04/29/draft-statement-concerning-the-treatment-of-human-remains-(2021)